Le référencement web, entre éthique et vandalisme des SERPs

Dans le numérique, nos proches ont souvent beaucoup de mal à comprendre ce que l’on trafique dans notre boulot. Chez nous, c’est assez simple à expliquer : nous aidons les sites à obtenir des visiteurs et à les faire convertir avec les contenus optimisés appropriés. Mais dès que l’on rentre dans les détails, hop : les yeux deviennent vitreux et roulent dans leurs orbites.

On caricature, mais la description précédente est quand même assez ressemblante. Pour qui n’est pas de la génération Y, on peut concevoir qu’il est difficile de saisir certaines notions relatives au web actuel… Ce qui explique aussi peut-être pourquoi certains clients veulent une prestation pour être preum’s sur « stylo », mais ceci est une autre histoire.

Pour les personnes qui comprennent ce que l’on fait – et grosso modo comment on s’y prend – les attitudes oscillent entre intérêt, étonnement et… consternation. Bon, le dernier terme est un peu fort, mais c’est néanmoins ce que l’on nous a sous-entendu. Pour résumer l’affaire, les contenus SEO c’est « tricher », car en concurrence directe avec les petits sites web fignolés avec amour par leur propriétaire passionné (et qui, lui, ne squatte pas les tops positions).

On doit avouer que l’on n’avait jamais imaginé les choses sous cet angle.

L’enfer des tranchées dans les SERPs

La problématique est la suivante : user de techniques de référencement pour placer son site en top position est-il malhonnête ? La question est intéressante à plus d’un titre, notamment parce qu’elle jette un regard vierge sur le petit microcosme du SEO. Les vieux routards white / grey / black hat (rayez les mentions inutiles) n’ont peut-être plus le recul nécessaire pour envisager les choses sous cette perspective ; en tout cas, le problème est apparu clairement aux profanes.

La réponse n’est sans doute pas aussi absolue qu’on pourrait le penser, et les plus rapides s’empresseront de s’égosiller : « C’est vraiment n’importe quoi, c’est le jeu de la concurrence ma bonne dame, le meilleur gagne, c’est comme ça depuis toujours ! ».

Certes.

L’histoire du Commerce, avec un grand C, est jalonnée de tirs croisés et de coups tordus entre ses différents belligérants, et le SEO apparaît comme une arme numérique moderne pour prendre l’avantage sur un concurrent, un secteur, voire tout un marché de niche. Que l’on ne s’y trompe pas : le SEO se trouve aux confluents de la guerre économique et de la guerre d’information. Il serait d’ailleurs facile d’établir des analogies entre le référencement web et la guerre pure et simple – nous, quand on nous parle de blast, on ne peut pas m’empêcher d’imaginer de grosses pièces d’artillerie cracher un déluge d’acier (ça tombe bien, on fête le centenaire de la Grande Guerre).

Si le SEO s’inscrit logiquement dans une stratégie de développement commercial, est-il néanmoins utilisé sans traîtrise ni abus ? Ou tire-t-on plutôt à feu nourri sur les brancardiers et les ambulanciers ? Le terrain est ici plus vaseux. Vous n’êtes pas sans savoir que la justice a déjà statué sur la question, en condamnant la société Saveur Bière pour son réseau de sites satellites. A l’exemple de Google qui tolère une pratique puis la banni le lendemain, le SEO devient tout à coup source de concurrence déloyale. Une première dans la jurisprudence française… Et qui ouvre de nouvelles perspectives.

Les vilains voleurs de positions

Les SEO ne seraient-ils alors rien d’autre que de misérables voleurs de positions ? Si l’arrêté rendu par le juge ne tient pas compte de nombreuses réalités – et se trouve donc fort discutable – l’on peut toutefois se poser la question, en toute candeur, pour les ignobles MFA bricolés en 2 minutes qui se retrouvent surclassés dans les SERPs et ce, en dépit de la bouillie piteuse qui est servie à l’internaute entre ses pages. Si le Dieu Google le veut bien, on poussera toutefois un soupir de soulagement en voyant un énorme pingouin s’écraser sur l’abomination en question quelques mois plus tard – ouf, justice est faite…

Dans ces conditions, l’on veut bien admettre que oui, effectivement, c’est « scandaleux » que ce genre de « site » avec dix millions de liens dans la panse génère plus de trafic (et de pognon) que le petit blog de Marcel, dévoué stakhanoviste numérique depuis six ans, et pour qui le SEO est aussi parlant que la théorie des cordes bosoniques. Notre petit cœur tout mou attache toujours une importance particulière à la passion et aux articles riches en contenu, que voulez-vous. En ce sens, on ne peut qu’approuver Google et sa volonté d’imposer au monde la création de contenus uniques et pertinents. Les SERPs sont déjà assez vandalisées pour que l’on se permette de continuer encore.

Imaginons maintenant le cas inverse : un MFA – ou un site d’ailleurs, qu’importe – bien construit, logique, clair, documenté, sourcé. Bref, un truc béton, avec pléthore de textes impeccables, utiles pour l’internaute, sur lesquels ce saltimbanque de référenceur a sué sang et eau pour les sortir de son esprit tordu et paranoïaque. Même si ce brigand de SEO a récupéré des textes à droite et à gauche pour les reformuler et les synthétiser, faut-il jeter son œuvre sur les flammes d’un bûcher parce qu’il vient d’éclater le blog d’entreprise austère de Marcel ?

C’est l’histoire de Jobs et de Picasso dans un bateau

Dans ce dernier cas, pour nous, la réponse est claire : non, trois fois non. Dès lors qu’il y a du travail, et même si le site parasite se nourrit des articles passionnés des petites mains anonymes du web, le travail du référenceur devrait être reconnu et accepté pour ce qu’il est, surtout si c’est utile aux internautes. Alors oui, ce n’est pas joli-joli de construire un site oueb en utilisant les passions des autres, ou de leur piquer leur boulot pour mieux le remanier. Mais c’est ainsi, c’est le jeu de la concurrence ; « pillage et développement » comme dirait machin.

Notre position est claire : comme le disait ce bon vieux Picasso, « les bons artistes copient et les grands artistes volent » et Jobs d’ajouter « et nous n’avons aucune honte à l’idée de voler les grandes idées ».

Alors n’ayons pas honte de piller les trésors enfouis dans les abysses du net afin de les remonter, de les nettoyer et de les placer dans de belles vitrines de musée à la vue de tous : c’est le meilleur service que l’on peut rendre à un billet utile, pertinent, anonyme et surtout, perdu dans quelque crevasse numérique 28.0.

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