Les tourments de la rédaction web

La rédaction web, c’est bien l’un des rares métiers où les clients déboulent avec leurs propres tarifs tirés du chapeau 🎩

Genre : « Cherche rédacteur spécialisé dans les systèmes de réfrigération calorifiques pour article mensuel. Tarif : 0.01 centime le mot, non négociable, rédacteurs débutants s’abstenir ».

Sinon ça se passe bien l’esclavage en 2022 ? 🤗

Quand on applique ça à d’autres métiers, ça devient proprement ridicule :

– « Cherche traiteur qui fasse repas pour 30 personnes pour 50€, non négociable ».

– « Cherche garagiste pour changement de plaquettes de frein, 60€ tout compris ».

– « Cherche coiffeur pour mes enfants. Rémunération en visibilité. Bisou ».

N’importe qui leur rirait au nez. Mais dans le secteur de la rédaction, ce n’est malheureusement pas toujours le cas.

Faites-vous une orchidée : chers collègues, vous exercez un fabuleux métier qui n’est pas donné à tout le monde (quoi qu’on en dise), alors envoyez ces fols dingos dans un tas de ronces.

Toujours sur la tarification, par curiosité, on s’est amusés à scraper les prix des rédac’ sur Malt.

Avez-vous une petite idée de la moyenne des prix pratiqués sur la plateforme ?

👉 Bah on est à 262,5€ / jour (moyenne élaborée à partir de 252 profils).

Ça tombe assez bien dans les clous des propres chiffres du baromètre Malt (qui affiche 390€ en référence, mais ça c’est pour les rédacs expérimentés ++, on tombe à 239€ pour les juniors et 288€ pour ceux qui ont de la bouteille).

Bon, le soucis, c’est que ça veut tout et rien dire. Combien d’articles écrit-on pour 262 balles ? Combien de mots comportent-ils ?

D’ailleurs, faut-il nécessairement facturer au mot ?

(spoiler : non)

Petit aparté : combien ça coûte, une stratégie éditoriale ?

Allez, parlons prix. Combien ça coûte, une « stratégie éditoriale » ?

Réponse : ça dépend. Voilà, merci, à vous les studios !

Ça vaaa, on blagounait. Mais la réponse est pourtant assez exacte : ça dépend de quoi est composée la mission (et de pleins d’autres trucs, comme le TJM du free ou de l’agence par exemple).

👉 Mais partons sur un « package » assez standard, à savoir :

– Analyse et brassage de données pour identifier les centres d’intérêts / problématiques / besoins utilisateurs afin de créer du contenu utile ;

– Audit des contenus actuels, benchmark, analyse de visibilité sur le moteur pour se situer par rapport à ses concurrents ;

– Travail sur l’identité et la charte éditoriale ;

– Matrice de contenus et calendrier de publications ;

– KPI + tableau de bord associés pour piloter les perfs.

Pour tout ça, chez nous, ça va en moyenne de 8000€ à 15 000€, voire davantage s’il y a des complexités supplémentaires (ou d’autres missions à rajouter dans le lot, of course). Et on ne parle même pas d’opérationnel, là.

Par contre, côté agence, pour la même typologie de mission, on a vu un projet à 30k, et le maximum que aie vu (toujours pour de la strat’ éditoriale), c’est 62k… toujours sans aucun opérationnel (aka d’écriture de contenus, de copywriting ou de ghostwriting).

En résumé : ça dépend. Ravi de vous avoir aidés !

Le top des phrases entendues dans la rédaction web

Mais bon, les prix, c’est une chose.

Il y a aussi toutes ces petites perles que l’on peut entendre dans nos métiers (bon, pas trop chez nous, on est trop chers pour ce genre de loosers) :

— « D’abord, on va faire un test gratuit pour voir si vous faites l’affaire ».

— « Quel est votre tarif au mot ? Oulah, non, c’est trop cher ».

— « Il est hors de question que je paie un article scribouillé en 1 heure ».

— « Je voudrais du texte pour améliorer mon SEO ».

— « J’ai un rédacteur russo-pakistanais qui prend moitié moins cher que vous »

— « Pourriez-vous répéter ce mot-clef 50 fois dans le texte ? »

— « N’en faites pas tout un camembert, écrire, ce n’est pas si compliqué »

— « Ah, parce qu’il existe des formations pour rédiger sur le web ? »

— « Je n’accepterais pas une densité de mots-clefs inférieure à 10% »

— « Votre proposition est intéressante mais je vais prendre un stagiaire »

Désespérant.

Faut-il accepter les tests gratuits en rédaction web ?

Mais allons-y franco, parlons d’autres choses désespérantes !

Il y a des siècles, autre vie, autre époque ; coup de téléphone :

— Bonjour, je suis Marie-Josiane de la Tarbandière, j’ai eu votre contact de la part de Truc et je voulais savoir si vous étiez intéressé par une mission de rédaction SEO.

Bon, déjà à l’époque, la rédac’ purement SEO, ça ne nous intéressait plus vraiment, mais qu’importe, « why not » que l’on répond, et on creuse le truc.

Sur le papier, c’est tout de même intéressant, et le budget est là, ce qui n’est pas si commun. Bref, discussion cool, tout se passe bien, lorsque :

— Alors, avant d’aller plus loin, je vous propose d’abord de faire un test de rédaction afin de voir si vos compétences sont en adéquation avec ce que nous recherchons.

Silence au bout du fil, on est un peu WTF. Déjà, si quelqu’un vous recommande, c’est qu’en théorie, vous faites le taf’. Mais surtout… un test ? RIRES. On décline aussitôt.

Marie-Josiane a quand même insisté. Trois fois. Trois refus.

À la fin, elle m’a demandé d’y réfléchir, et de rappeler si j’étais tout de même intéressé.

Sur ces entrefaites, message d’utilité publique : collègues rédacteurs, si on vous demande de faire un « test gratuit » ou de vous rémunérer si le test est « concluant »…

🏃 Fuyez.

Le test n’est jamais une bonne idée. Bizarrement, on ne demande jamais à un graphiste un « logo-test », ou à un développeur une « application-test ».

Au même titre que la création d’un logo ou d’une charte graphique, l’écriture d’articles, de pages de destination ou de contenu de marque relève d’une prestation intellectuelle personnalisée en fonction de l’entreprise, de la commande et de l’objectif à atteindre.

Dans ces conditions, un test, c’est bénéficier d’un travail gratuit, ni plus ni moins.

Si votre prospect a besoin d’être rassuré quant à vos compétences, références et portfolio doivent parfaitement remplir cet office 👌

Écrire des articles au kilomètre, ça ne sert à rien

Et puis, on a aussi…

— « Allô bonjour, nous avons pour projet de créer 5 articles de blog par semaine, ça vous intéresse ? »

Euh, alors oui, mais non.

Perso, la première image qui nous vient à l’esprit, c’est celle de Rambo avec sa mitrailleuse : on sulfate du texte au kilomètre parce qu’on nous a dit que maintenant, le contenu, c’est important (🙃)

Et quand on approfondit le besoin, deux fois sur trois, il n’y a aucune stratégie éditoriale qui préside à cette surproduction de contenus.

Oui oui, on parle bien de surproduction : on voudrait noyer son lectorat potentiel sous une déferlante d’informations que l’on ne s’y prendrait pas autrement…

… à moins qu’il n’y ait une strat’ de granularité avec différents contenus pour différentes cibles, mais là, on parle d’un prospect aussi mythique que le dahu.

Ça nous rappelle une petite discussion au coin du feu avec un prospect :

Bibi — […] De toute façon, on ne facture pas au signe. Nous estimons devoir répondre avant tout, et de façon exhaustive, aux besoins de vos cibles.

Prospecto patronum — Ah ! D’accord. Les articles sont assez longs du coup ?

Bibi — Ça dépend, mais oui, ça peut faire de beaux pavés.

P.P — Tant mieux. J’ai lu que plus les articles étaient longs, mieux c’était pour le SEO.

(convulsion, défaillance cardiaque)

Déjà, on n’est pas obligé d’écrire systématiquement avec une surcouche SEO. Quand on fait du contenu de conversion (dit autrement du copywriting, comme c’était normalement le cas ici), on s’en fiche comme d’une guigne.

Ensuite, dans l’absolu, il faut répondre de façon exhaustive à la ou les problématiques de l’utilisateur, ni plus ni moins.

Enfin, long contenu n’est pas forcément synonyme de bonne visibilité : ça, c’est une légende qui a la peau dure.

Bref, halte au contenu bulldozer, et place au contenu chirurgical.

Être premier sur sa top requête, est-ce que ça a encore du sens en rédac’ web ?

C’est quand même sacrément triste, en 2021, de voir encore passer des injonctions à construire des textes autour d’une « top requête », ou à respecter 1% de densité de mots-clefs… 🙃

Ça ne choque personne ?

Vous avez pas l’impression que ce sont des conseils qu’on donnait en 2011, soit à l’ère du Cambrien niveau rédaction web ?

Tiens, d’ailleurs, poursuivons :

👉 Le suivi des positions en SEO a-t-il encore un sens aujourd’hui ?

Oui, je sais, quelle infamie, quelle indignation, ils osent s’attaquer aux Saintes-Position – qu’on les étripaille séance tenante ! 😱

Mais à force de voir Google évoluer à marche forcée d’un côté, et certains SEO monitorer scrupuleusement leurs positions de l’autre, il serait intéressant – et pertinent – d’interroger cette méthodologie préhistorique afin de déterminer s’il y a des points de divergence sur la question.

Bref, doit-on faire du suivi de positions comme il y a dix ans ?

Existe-t-il des méthodologies plus efficientes ?

Et d’abord, qu’est-ce que l’on entend par « position » en 2020 ?

Autant d’éléments balayés au crible dans l’article ci-dessus.

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