Interrogations métaphysiques au sujet des positions
Quand nous avons commencé à réfléchir sur la question, on s’est sentis bien seuls côté francophone ; nous avons été proprement incapables de trouver un ou plusieurs articles qui interrogent le bien-fondé de la sacro-sainte position en 2020 (frontalement et sans ambiguïté, entendons-nous). Il y a bien un billet d’EnPause consacré au sujet, mais il nous semble encore un peu timide dans l’approche, bien qu’ébauchant des interrogations concrètes et des solutions (certes déjà vues ailleurs) pour y pallier.
Les SEO ont pourtant bien vu une évolution notable, aucun doute là-dessus. Déjà, en 2015 (soit une éternité), Ryan Stewart décrivait sur Moz combien il était fatigué des demandes du type « bonjour, je voudrais être premier sur ce mot-clef !« , en arguant du fait que le SEO ne fonctionnait plus comme ça.
Il concluait d’ailleurs sur ces termes :
« We can’t just « rank and bank » for whatever we want anymore. […] As Google gets more intelligent, we need to get more intelligent about how we approach marketing. That doesn’t mean looking for ways to beat the search engine algorithms. Instead, we must learn to use them to our advantage.«
En 2015. Rendez-vous compte.
Et pendant ce temps-là, certains envoyaient encore leur petit rapport de positions. C’est plutôt triste.
En 2016, c’est Rand Fishkin qui prend la plume pour écrire à ce sujet. On peut soupçonner un léger conflit d’intérêt sur la question du suivi des positions, bien que Fishkin l’avoue lui-même et annonce rester impartial autant que se peut. C’est louable, mais le reste sera donc à prendre avec des pincettes.
Il commence par écrire l’une des choses suivantes :
« I think that if you turn it off and you don’t do it, it’s very hard to get a lot of the value that we need as SEOs, a lot of the intelligence. It’s true there are challenges with keyword ranking reports, but not true enough to avoid doing it entirely. We still get too much value from them. »
Deux choses intéressantes sont à surligner ici :
- Fishkin reconnaît que l’habituel tracking des positions a changé.
- Il affirme que malgré ces changements, il est néanmoins nécessaire de monitorer ses positions car il s’agit de données stratégiques.
Et aussi étonnant que cela puisse paraître, nous sommes d’accords avec ce dernier point ; relisez tout ce que l’on vient d’énoncer jusqu’à maintenant, nous n’avons jamais été contre l’analyse des positions.
C’est la méthodologie encore usitée qui est discutable.
Bref, poursuivons ; Fishkin détaille tous les cas possibles où le suivi des positions pose problème, puis y oppose des parades en se référant à son outil. Nous rentrons ici dans du marketing peu ou prou dissimulé – de toute façon, dès lors qu’il y a conflit d’intérêt, difficile d’être totalement objectif.
On retiendra néanmoins cette phrase en commentaire :
« I think that ranking reports have plenty of weaknesses to be sure, but they’re still an essential part of what we do. »
Autre exemple avec Cognitive SEO qui se fend à son tour d’un article fin 2017 pour expliquer en substance que, oui, l’exercice du monitoring des positions a changé, et non, il ne faut pas l’abandonner :
« Despite all the restless pessimistic thoughts and nagging questions, we believe that things have changed indeed but rank tracking is far from dead. »
S’ensuit un exercice similaire à celui de Fishkin (l’annonce de tentative d’objectivité en moins) où plusieurs arguments possibles sont balayés face au génie de l’outil de Cognitive.
Parmi les arguments « contre le suivi des positions », on retrouve la question de l’intention utilisateur :
« To this extent, many say that keywords are long forgotten and now context is king. »
C’est bien évidemment jeter le bébé avec l’eau du bain (jusqu’à preuve du contraire, l’intention est – entre autres – déterminée avec des expressions), et Cognitive a raison de remettre ensuite les pendules à l’heure.
Là où ça devient intéressant, c’est qu’il préconise d’étudier la Longue Traîne pour affiner ses monitoring (« One smart move would be to monitor long tail keywords or queries »).
Pourquoi c’est intéressant ? Car tout le monde est à peu près d’accord pour affirmer, chiffres ou sources parfois à l’appui, que c’est la Longue Traîne qui génère le plus d’audience et le plus de chiffre d’affaires sur un site web. Cela tombe de toute façon sous le sens : les requêtes sont aussi nombreuses que les internautes qui les tapent, et plus une requête est spécifique, plus elle s’inscrit en aval de la conversion.
Dans ce cas-là, excusez du peu – mais pourquoi monitorer encore une liste de top requêtes ? Et pourquoi se focaliser sur un classement premier / deuxième / troisième alors que l’intérêt de la position (et le CTR, par exemple) varie fortement en fonction de la typologie de SERP ?